Texte 1995009398
Chapitre 1er.- Traite des êtres humains.
Article 1er.Un article 77bis, libellé comme suit, est inséré dans la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers :
"Art. 77bis. § 1. Quiconque contribue, de quelque manière que ce soit, soit directement soit par un intermédiaire, à permettre l'entrée ou le séjour d'un étranger dans le Royaume et, ce faisant :
1°fait usage à l'égard de l'étranger, de façon directe ou indirecte, de manoeuvres frauduleuses, de violence, de menaces ou d'une forme quelconque de contrainte ;
2°ou abuse de la situation particulièrement vulnérable dans laquelle se trouve l'étranger en raison de sa situation administrative illégale ou précaire, d'un état de grossesse, d'une maladie, d'une infirmité ou d'une déficience physique ou mentale ;
sera puni d'un emprisonnement d'un an à cinq ans et d'une amende de cinq cents francs à vingt-cinq mille francs.
§ 2. L'infraction visée au § 1er sera punie de réclusion et d'une amende de cinq cents francs à vingt-cinq mille francs, si elle constitue une activité habituelle.
§ 3. L'infraction visée au § 2 sera punie des travaux forcés de dix ans à quinze ans et d'une amende de mille francs à cent mille francs, si elle constitue un acte de participation à l'activité principale ou accessoire d'une association, et ce, que le coupable ait ou non la qualité de dirigeant.
§ 4. Les coupables des infractions visées aux § 2 et § 3 seront en outre condamnés à l'interdiction des droits spécifiés aux n° 1er, 3, 4 et 5 de l'article 31 du Code pénal.
§ 5. La confiscation spéciale prévue à l'article 42, 1°, du Code pénal peut être appliquée, même lorsque la propriété des choses sur lesquelles elle porte n'appartient pas au condamné. ".
Art. 2.L'article 379 du Code pénal est remplacé par la disposition suivante :
"Art. 379. Quiconque aura attenté aux moeurs en excitant, favorisant ou facilitant, pour satisfaire les passions d'autrui, la débauche, la corruption ou la prostitution d'un mineur de l'un ou de l'autre sexe, sera puni de réclusion et d'une amende de cinq cents francs à vingt-cinq mille francs.
Il sera puni des travaux forcés de dix ans à quinze ans et d'une amende de cinq cents francs à cinquante mille francs si le mineur n'a pas atteint l'âge de seize ans accomplis.
La peine sera des travaux forcés de quinze ans à vingt ans et d'une amende de mille francs à cent mille francs, si le mineur n'a pas atteint l'âge de dix ans accomplis. ".
Art. 3.L'article 380bis du même Code est remplacé par la disposition suivante :
"Art. 380bis. § 1. Sera puni d'un emprisonnement d'un an à cinq ans et d'une amende de cinq cents francs à vingt-cinq mille francs :
1°quiconque, pour satisfaire les passions d'autrui, aura embauché, entraîné, détourné ou retenu, en vue de la débauche ou de la prostitution, même de son consentement, une personne majeure (...) ;
2°quiconque aura tenu une maison de débauche ou de prostitution ;
3°quiconque aura vendu, loué ou mis à disposition aux fins de la prostitution des chambres ou tout autre local dans le but de réaliser un profit anormal ;
4°quiconque aura, de quelque manière que ce soit, exploité la débauche ou la prostitution d'autrui.
§ 2. La tentative de commettre les infractions visées au § 1er sera punie d'un emprisonnement de six mois à trois ans et d'une amende de cent francs à cinq mille francs.
§ 3. Seront punies des travaux forcés de dix ans à quinze ans et d'une amende de cinq cents francs à cinquante mille francs, les infractions visées au § 1er, dans la mesure où leur auteur :
1°fait usage, de façon directe ou indirecte, de manoeuvres frauduleuses, de violence, de menaces ou d'une forme quelconque de contrainte ;
2°ou abuse de la situation particulièrement vulnérable d'une personne en raison de sa situation administrative illégale ou précaire, d'un état de grossesse, d'une maladie, d'une infirmité ou d'une déficience physique ou mentale.
§ 4. Sera puni des travaux forcés de dix ans à quinze ans et d'une amende de mille francs à cent mille francs :
1°quiconque, pour satisfaire les passions d'autrui, aura embauché, entraîné, détourné ou retenu, soit directement soit par un intermédiaire, un mineur âgé de moins de seize ans, même de son consentement, en vue de la débauche ou de la prostitution ;
2°quiconque aura tenu, soit directement soit par un intermédiaire, une maison de débauche ou de prostitution où des mineurs se livrent à la prostitution ou à la débauche ;
3°quiconque aura vendu, loué ou mis à disposition d'un mineur, aux fins de la débauche ou de la prostitution, des chambres ou tout autre local dans le but de réaliser un profit anormal ;
4°quiconque aura exploité, de quelque manière que ce soit, la débauche ou la prostitution d'un mineur âgé de moins de seize ans.
§ 5. Les infractions visées au § 4 seront punies des travaux forcés de quinze ans à vingt ans et d'une amende de mille francs à cent mille francs si elles sont commises à l'égard d'un mineur de moins de dix ans. ".
Art. 4.Dans le même Code, il est inséré un article 381bis, libellé comme suit :
"Art. 381bis. Les infractions visées aux articles 379 et 380bis, §§ 3 et 4, seront punies des travaux forcés de quinze ans à vingt ans et d'une amende de mille francs à cent mille francs si elles constituent des actes de participation à l'activité principale ou accessoire d'une association, et ce, que le coupable ait ou non la qualité de dirigeant. ".
Art. 5.A l'article 382 du même Code, les modifications suivantes sont apportées :
1°à l'alinéa 1er, la référence aux articles 380, 380ter et 381 est supprimée ;
2°l'alinéa 2 est complété par ce qui suit :
" Sans avoir égard à la qualité de la personne physique ou morale de l'exploitant, propriétaire, locataire ou gérant, le tribunal peut ordonner la fermeture de l'établissement dans lequel les infractions ont été commises, pour une durée d'un mois à trois ans à compter du jour où la condamnation contradictoire ou par défaut sera devenue irrévocable.
Toute infraction à la disposition du jugement ou de l'arrêt ordonnant la fermeture de l'établissement sera punie d'un emprisonnement de six mois à trois ans et d'une amende de mille francs à cinq mille francs ou d'une de ces peines seulement. ".
Art. 6.Dans le même Code, il est inséré un article 382bis, libellé comme suit :
"Art. 382bis. La confiscation spéciale visée à l'article 42, 1°, peut être appliquée, même si la propriété des choses sur lesquelles elle porte n'appartient pas au condamné. ".
Chapitre 2.- Pornographie enfantine.
Art. 7.Un article 383bis, libellé comme suit, est inséré dans le même Code :
"Art. 383bis. § 1. Sans préjudice de l'application des articles 379 et 380bis, quiconque aura exposé, vendu, loué, distribué ou remis des emblèmes, objets, films, photos, diapositives ou autres supports visuels qui représentent des positions ou des actes sexuels à caractère pornographique, impliquant ou présentant des mineurs âgés de moins de seize ans ou les aura, en vue du commerce ou de la distribution, fabriqués ou détenus, importés ou fait importer, remis à un agent de transport ou de distribution, sera puni de réclusion et d'une amende de cinq cents francs à dix mille francs.
§ 2. Quiconque aura sciemment possédé les emblèmes, objets, films, photos, diapositives ou autres supports visuels visés sous le § 1er, sera puni d'un emprisonnement d'un mois à un an et d'une amende de cent francs à mille francs.
§ 3. L'infraction visée sous le § 1er, sera punie des travaux forcés de dix ans à quinze ans et d'une amende de cinq cents francs à cinquante mille francs, si elle constitue un acte de participation à l'activité principale ou accessoire d'une association, et ce, que le coupable ait ou non la qualité de dirigeant.
§ 4. La confiscation spéciale prévue à l'article 42, 1°, peut être appliquée à l'égard des infractions visées aux §§ 1er et 2, même lorsque la propriété des choses sur lesquelles elle porte n'appartient pas au condamné.
§ 5. L'article 382 est applicable aux infractions visées aux §§ 1er et 3. ".
Chapitre 3.- Extra-territorialité.
Art. 8.Un article 10ter, rédigé comme suit, est inséré au Titre préliminaire du Code d'instruction criminelle :
"Art. 10ter. Le Belge ou l'étranger trouvé en Belgique, qui aura commis hors du territoire du Royaume une des infractions prévues par les articles 372, 373, 375, 376 et 377 du Code pénal si le fait a été commis sur la personne d'un mineur de moins de 16 ans accomplis, par les articles 379, 380bis, 381bis et 383bis, § 1er et § 3, du même Code, par l'article 77bis, § 2 et § 3, de la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers et par les articles 10, 11, 12 et 13 de la loi du 9 mars 1993 tendant à réglementer et à contrôler les activités des entreprises de courtage matrimonial pourra être poursuivi en Belgique même si l'autorité belge n'a reçu aucune plainte ou avis officiel de l'autorité étrangère. ".
Chapitre 4.- Action en cessation.
Art. 9.Une action en cessation peut être introduite auprès du président du tribunal de première instance par les ministres compétents s'il y a constatation d'infractions à la législation sociale dans les lieux où il y a un motif raisonnable de supposer que sont commises les infractions visées (soit aux articles 379, 380, 433quinquies à 433octies du Code pénal, soit aux articles 77bis à 77quinquies) de la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. <L 2005-08-10/61, art. 38, 001; En vigueur : 12-09-2005>
Art. 10.L'action est formée et instruite selon les formes du référé.
Elle peut être formée par requête. Celle-ci est déposée en quatre exemplaires au greffe du tribunal de première instance ou envoyée à ce greffe par lettre recommandée par la poste.
Le greffier de ce tribunal avertit sans délai la partie adverse par pli judiciaire et l'invite à comparaître au plus tôt trois jours et au plus tard huit jours après l'envoi du pli judiciaire, auquel est joint un exemplaire de la requête introductive.
Sous peine de nullité, la requête contient :
1°l'indication des jour, mois et an ;
2°les nom, prénoms, profession et domicile du requérant ;
3°les nom et adresse de la personne morale ou physique contre laquelle la demande est formée ;
4°l'objet et l'exposé des moyens de la demande ;
5°la signature de l'avocat.
Il est statué sur l'action après avoir entendu le ministère public, nonobstant toute poursuite exercée en raison des mêmes faits devant toute juridiction pénale.
Le jugement est exécutoire par provision, nonobstant tout recours et sans caution.
Le greffier est tenu d'informer sans délai le ministre du recours introduit contre toute décision rendue en application de l'article 9.
Chapitre 5.- Exécution et suivi de la loi.
Art. 11.§ 1er. (Pour l'application du présent chapitre, il y a lieu d'entendre :
1°par traite des êtres humains : les infractions visées aux articles [1 ...]1 433quinquies à 433octies du Code pénal;
2°par trafic des êtres humains : les infractions visées aux articles 77bis à 77quinquies de la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers;
["3 3\176 par victime de traite des \234tres humains: toute personne, belge ou \233trang\232re, \224 l'encontre de laquelle aurait \233t\233 commise l'infraction vis\233e \224 l'article 433quinquies du Code p\233nal; 4\176 par victime de trafic des \234tres humains: toute personne \224 l'encontre de laquelle aurait \233t\233 commise l'infraction vis\233e \224 l'article 77bis de la loi du 15 d\233cembre 1980 sur l'acc\232s au territoire, le s\233jour, l'\233tablissement et l'\233loignement des \233trangers; 5\176 par victime de forme aggrav\233e de trafic des \234tres humains: toute personne \224 l'encontre de laquelle aurait \233t\233 commise l'infraction vis\233e \224 l'article 77bis de la m\234me loi en pr\233sence d'une circonstance vis\233e aux articles 77ter \224 77quinquies de la m\234me loi."° <L 2005-08-10/61, art. 39, 001; En vigueur : 12-09-2005>
["3 \167 1er/1. Lorsque les services de police ou d'inspection disposent d'indices selon lesquels une personne est victime de traite des \234tres humains ou de trafic aggrav\233 des \234tres humains, ils mettent cette personne en contact avec un centre sp\233cialis\233 dans l'accueil et l'accompagnement des victimes de ces infractions, sans pr\233judice de l'application de l'article 61/2, \167 1er, alin\233a 1er, de la loi du 15 d\233cembre 1980 sur l'acc\232s au territoire, le s\233jour, l'\233tablissement et l'\233loignement des \233trangers."°
§ 2. Dans le cadre de ses compétences, le Roi détermine les règles et mesures concrètes qu'Il estime opportun de fixer et de prendre en faveur des victimes de la traite (et du trafic) des êtres humains afin de (...) les aider, notamment, dans leurs éventuelles démarches en justice.
["3 A cet effet, il fixe les conditions pour la reconnaissance et pour l'agr\233ment pour ester en justice de centres sp\233cialis\233s dans l'accueil et l'accompagnement des victimes de traite des \234tres humains et de formes aggrav\233es de trafic des \234tres humains. Par \"reconnaissance\", il y a lieu d'entendre la capacit\233 \224 mettre en oeuvre les proc\233dures vis\233es au chapitre IV du Titre II de la loi du 15 d\233cembre 1980 sur l'acc\232s au territoire, le s\233jour, l'\233tablissement et l'\233loignement des \233trangers, et \224 constituer un point d'orientation pour les services en charge de la d\233tection des victimes de traite des \234tres humains et de formes aggrav\233es de trafic des \234tres humains, avec pour objectif la participation de ces victimes \224 la proc\233dure judiciaire. Par \"agr\233ment\", il y a lieu d'entendre l'ex\233cution du paragraphe 5. Les centres reconnus et agr\233\233s peuvent faire l'objet d'une subsidiation dans le cadre de l'exercice des missions li\233es \224 leur reconnaissance et leur agr\233ment. Le Roi fixe les modalit\233s d'octroi et de retrait des subsides allou\233s dans le cadre de l'ex\233cution de ces missions."° <L 2005-08-10/61, art. 39, 001; En vigueur : 12-09-2005>
§ 3. L'article 2 de la loi du 15 février 1993 créant un Centre pour l'égalité des chances et la lutte contre le racisme, est complété comme suit : " Le Centre est en outre chargé de stimuler la lutte contre la traite des êtres humains. ".
§ 4. A l'article 3, 5°, de la même loi, les mots "auxquels l'application de la loi du 30 juillet 1981 tendant à réprimer certains actes inspirés par le racisme ou la xénophobie pourrait donner lieu ;" sont remplacés par les mots " auxquels pourrait donner lieu l'application de la loi du 30 juillet 1981 tendant à réprimer certains actes inspirés par le racisme ou la xénophobie ou l'application de la loi du ... contenant des dispositions en vue de la répression de la traite des êtres humains et de la pornographie enfantine ".
§ 5. [2 Sans préjudice de l'article 17, alinéa 2, du Code judiciaire, les associations]2 agréées à cet effet par le Roi et les organismes d'intérêt public peuvent ester en justice dans tous les litiges auxquels l'application de la présente loi pourrait donner lieu.
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(1L 2016-05-31/02, art. 18, 003; En vigueur : 18-06-2016)
(2L 2018-12-21/09, art. 143, 004; En vigueur : 10-01-2019)
(3L 2022-03-21/01, art. 115, 005; En vigueur : 01-06-2022)
Art. 12.Le Gouvernement fait (tous les deux ans) rapport au Parlement sur l'application de la présente loi et sur la lutte contre la traite (et le trafic) des êtres humains en général. Ce rapport contient notamment un exposé de la situation en ce qui concerne les poursuites judiciaires. <L 2005-08-10/61, art. 40, 001; En vigueur : 12-09-2005>
Chapitre 6.- Disposition modificative.
Art. 13.Un 17°, libellé comme suit, est inséré dans l'article 90ter, § 2, du Code d'instruction criminelle :
"17° l'article 77bis, § 2 et § 3 de la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers. ".
Chapitre 7.- Dispositions abrogatoires.
Art. 14.Sont abrogés :
1°les articles 380, 380ter et 381 du Code pénal ;
2°la mention des articles 380 et 380ter du Code pénal dans l'article 90ter, § 2, 5°, du Code d'instruction criminelle inséré par la loi du 30 juin 1994 relative à la protection de la vie privée contre les écoutes, la prise de connaissance et l'enregistrement de communications et de télécommunications privées ;
3°la loi du 26 mai 1914 sur la répression de la traite des blanches.